La rémunération de Pierre Karl Péladeau fait débat parmi les experts
Stéphane Rolland | Les AffairesPour son «travail exceptionnel», le grand patron de Québecor, Pierre Karl Péladeau, s’est fait octroyer un incitatif à long terme, dont la valeur est estimée à 18,5 millions de dollars (M$), selon des documents réglementaires envoyés aux actionnaires.
La prime ne fait pas l’unanimité chez trois experts en gouvernance consultés. M. Péladeau détient 2,4 milliards de dollars (G$) en actions de la société montréalaise et contrôle 76% des droits de vote. L’homme d’affaires a ainsi déjà un incitatif pour maximiser la valeur à long terme des actionnaires, selon deux d’entre eux.
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«Ce ne sera sûrement pas ce montant-là , explique le président-directeur général de l’Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques (IGOPP), François Dauphin, en entrevue. Ça peut être beaucoup plus. Ça peut être moins. Ça pourrait être zéro.»
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Une somme «considérable»
Le professeur et codirecteur du Centre d’études en droit économie de l’Université Laval, Ivan Tchotourian, se dit «surpris» par les sommes «considérables» en jeu, tandis que M. Péladeau est déjà actionnaire de contrôle.
Il souligne que M. Péladeau a déjà un incitatif à maximiser la valeur des actionnaires. «Le bénéficiaire quelque part, qu’on le veuille ou pas, indirectement, c’est lui en tant qu’actionnaire de contrôle de tous ces choix qui sont faits», commente-t-il en entrevue.
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L’expert en gouvernance et professeur à l’Université Concordia, Michel Magnan, croit lui aussi qu’on peut se questionner sur l’effet incitatif de cette prime pour un dirigeant qui détient déjà une part importante de l’entreprise. «Pour un PDG qui détient pour des centaines de millions de dollars ou même des milliards de dollars en actions d’une entreprise, on peut s’interroger sur l’effet incitatif d’un octroi de quelques millions», écrit-il dans un courriel.
Les résultats des études sur les programmes de rémunération par options d’achat sont contradictoires, affirme M. Magnan. «Globalement, c’est loin d’être clair que c’est un bon moyen de rémunération», explique-t-il dans un courriel.
Pour sa part, M. Dauphin souligne que M. Péladeau aurait pu décider de ne pas travailler au sein de l’entreprise et simplement recevoir ses dividendes.
L’expert de l’IGOPP estime que le conseil d’administration de Québecor a voulu se montrer équitable envers M. Péladeau. «Ce n’est pas parce que vous êtes (un important actionnaire) et que, même si vous travaillez 80 heures par semaine, on va vous payer moins que l’équivalent de ce qu’on payerait pour un gestionnaire externe», nuance-t-il.Â
Contactée plus tôt en avant-midi, Québecor nous a renvoyés aux explications contenues dans la circulaire.