9 décembre 2020

La fondatrice du Centre Phi poursuit son ancienne assistante pour 15 millions

Roxane Léouzon | Le Devoir

La riche fondatrice du Centre Phi, à Montréal, poursuit son ancienne assistante personnelle. Elle allègue que cette dernière lui aurait volé près de 15 M$ par divers stratagèmes, afin de payer des voyages et des produits de luxe pour elle-même et d’autres personnes. Le procès est en cours au palais de justice de Montréal.

Phoebe Greenberg, héritière de l’importante société immobilière ontarienne Groupe Minto, a fondé le centre artistique multidisciplinaire du Vieux-Montréal, dont elle finance personnellement la majorité des activités, ainsi que plusieurs entreprises associées, dont le Groupe Phi et Diving Horse, qui réclament tous aujourd’hui réparation.

Selon le document de la poursuite, son assistante de confiance entre 2011 et 2017, Sandra Testa, aurait détourné les millions entre janvier 2016 et juillet 2017 en contrefaisant la signature de sa patronne, en utilisant sans autorisation les cartes de crédit personnelles de Mme Greenberg, du Groupe Phi et de Diving Horse et en transférant des fonds vers ses propres cartes de crédit et celles d’un présumé complice, l’homme d’affaires Nabil Salaheddine. M. Salaheddine est notamment l’ancien propriétaire du restaurant La Champagnerie.

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Un problème de gouvernance ?

Mme Greenberg se serait rendu compte que quelque chose clochait à la mi-mars 2017, lorsque le directeur des finances du Centre Phi de l’époque, Michel Bérubé, lui a indiqué que ses dépenses étaient très élevées. Une enquête comptable indépendante menée par le cabinet MNP, qui doit être présentée en cour aujourd’hui (mercredi), a conclu que Mme Testa était l’auteure de stratégies frauduleuses.

Le Centre Phi a écrit au Devoir qu’il « dispose désormais d’une nouvelle équipe de gestion et de comptabilité très expérimentée dont l’intégrité et la compétence sont incontestables ». « En outre, des mesures énergiques comprenant, entre autres, de nouveaux contrôles internes, des examens des dépenses, la séparation des tâches et un comité de contrôle et gouvernance ont été mises en place pour éviter que tout incident de cette nature ne se reproduise à l’avenir », a fait savoir le centre par le biais de l’entreprise de communications stratégique Navigator.

Selon deux experts en gouvernance d’entreprises, il s’agit de mesures « de base » pour contrôler les dépenses d’une entreprise. « C’est le minimum pour éviter des dérapages », indique Michel Magnan, titulaire de la chaire Jarislowsky en gouvernance d’entreprise et professeur à l’Université Concordia.

Selon le Registraire des entreprises du Québec, Mme Greenberg est la seule administratrice de ses entreprises, ce qui comporte des risques, selon M. Magnan. François Dauphin, président-directeur général de l’Institut de la gouvernance d’organisations privées et publiques, est du même avis.

« S’il y a une leçon à tirer, c’est de ne pas négliger notre gouvernance. Même si on se croit seul maître à bord et les deux mains sur le volant, il est important de mettre en place des contrepoids pour s’assurer du bon fonctionnement des finances », juge M. Dauphin, qui croit aux vertus des conseils d’administration.

Aucune des allégations n’a été prouvée en cour. Le procès se poursuit jusqu’au 18 décembre. Il est prévu que le témoignage de Mme Testa commence aujourd’hui (mercredi), alors que celui de Mme Greenberg a eu lieu la semaine dernière.

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