Offre d’achat et sortie de Bourse: Héroux-Devtek dit oui aux Américains
Julien Arsenault | La PresseAccepter une offre d’achat étrangère pour quitter la Bourse. Héroux-Devtek, l’un des principaux acteurs de l’industrie aéronautique, est la plus récente entreprise québécoise à opter pour cette formule – une transaction qui surprend le gouvernement Legault et qui témoigne d’une tendance à la mode.
En vertu d’une offre qui le valorise à 1,35 milliard, le spécialiste des trains d’atterrissage doit passer sous l’aile de Platinum Equity Advisors en mars 2025, moment où la clôture de la transaction est prévue. Pour l’entreprise établie à Longueuil, cela marquera la fin d’une aventure boursière de quatre décennies.
Cette décision de Héroux-Devtek témoigne d’un phénomène en hausse. Depuis 2023, au moins sept entreprises québécoises ont dit oui à une offre d’achat étrangère ou à une proposition leur permettant de se retirer de la Bourse. En contrepartie, l’unique introduction boursière québécoise sur une place d’envergure remonte à décembre dernier avec l’arrivée du fournisseur de logiciels d’aide à la conduite LeddarTech au NASDAQ.
« La tendance me préoccupe, laisse tomber le directeur de l’Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques (IGOPP), François Dauphin, en commentant la décision prise par Héroux-Devtek. Si on veut développer de nouveaux acteurs ou en ajouter à Québec inc., nous avons besoin de ces compagnies en Bourse. »
Selon l’expert, la transaction impliquant Héroux-Devtek constitue un autre exemple de l’inefficacité des marchés à refléter la « pleine valeur d’une organisation », ce qui se reflète sur le cours de son action.
Par exemple, Héroux-Devtek vaut environ neuf fois son bénéfice d’exploitation ajusté, d’après sa plus récente présentation aux investisseurs. Ailleurs dans l’industrie, ce ratio atteint 14,6 fois. La disparité est importante.
« C’est fâchant d’émettre de nouvelles actions à 25 % d’escompte par rapport à la valeur réelle d’une compagnie quand on souhaite récolter de l’argent », souligne M. Dauphin.
« Ça me trottait dans la tête »
Le comité spécial mis en place par Héroux-Devtek, qui compte des géants de l’aéronautique comme Boeing, Airbus, Lockheed Martin, Embraer et Dassault parmi ses clients, a visiblement été influencé par cet élément. Selon une analyse réalisée par Desjardins Marchés des capitaux, la « juste valeur marchande » de l’action du fabricant se situe entre 28,50 $ et 33 $. Mercredi, à la veille de l’annonce, l’action avait clôturé à 25,32 $.
Platinum Equity propose 32,50 $ pour chacune des actions de Héroux-Devtek, ce qui constitue une prime de 28 %. Sur le parquet de Bay Street, jeudi, le titre de la société a clôturé à 30,98 $. La haute direction de l’entreprise, qui comprend notamment le président exécutif du conseil Gilles Labbé et le président et chef de la direction Martin Brassard, va conserver leurs actions. Les deux dirigeants détiennent 10,4 % des titres de Héroux-Devtek.
« Quand est-ce que le cours de l’action allait nous valoriser comme on le mérite, ça me trottait dans la tête, confie M. Brassard, dans un entretien téléphonique. Je ne suis pas capable de mettre le doigt sur la raison. En [fermant le capital] de la compagnie, on va pouvoir continuer à croître. »
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