18 février 2013

Transparence fiscale dans le secteur des ressources naturelles

Yvan Allaire | Lesaffaires.com

Le secret qui entoure les sommes réellement versées aux gouvernements par les sociétés minières contribue à une certaine méfiance envers l’activité minière. Invoquant la confidentialité traditionnelle des données fiscales ainsi que des arguments de protection d’une information sensible d’un point de vue concurrentiel, les sociétés minières insistent pour que ne soient pas dévoilées les sommes versées en taxes minières et redevances.

Ces arguments ne convainquent pas lorsqu’il s’agit de ressources naturelles dont les citoyens sont collectivement propriétaires. Au Québec, cette protection de la confidentialité des montants versés par chaque mine sous forme de taxes minières est enchâssée dans la loi sur les mines.

Un organisme international, créé en 2002 à l’initiative de Tony Blair, alors premier ministre de Grande-Bretagne, «The Extractive Industries Transparency Initiative » (EITI ou ITIE en français), tente de convaincre pétrolières, minières, les gouvernements et autres parties de prendre des engagements de transparence envers les populations des régions dont proviennent ces ressources.

Ainsi, les sociétés « extractives » devraient rendre publiques les sommes versées aux différents gouvernements pour le droit d’exploiter les ressources naturelles du pays. Les gouvernements devraient rendre compte des montants reçus et versés aux fonds publics. Un appariement effectué par des vérificateurs indépendants de l’EITI donnerait aux populations l’assurance que les sommes versées par les minières sont effectivement entrées dans les coffres de l’État et servent bien aux fins sociales et économiques de la société civile.

Or, cette initiative, volontaire et privée, a reçu un immense appui par certaines dispositions de la loi Dodd-Frank, loi adoptée en juillet 2010 pour règlementer plus étroitement le secteur financier américain. En effet, cette loi comporte l’obligation pour toutes les sociétés des secteurs du pétrole, du gaz et des mines qui sont inscrites à l’une ou l’autre des Bourses américaines de rendre publiques toutes les sommes versées sous forme de taxes, de redevances et autres à tous les gouvernements où elles exercent leurs activités.

La Commission des valeurs mobilières américaine (la SEC), responsable de la mise en œuvre de cette stipulation et d’en préciser la portée et le fonctionnement, a maintenant adopté des règles en conformité avec la loi Dodd-Frank : l’obligation de divulgation s’applique aux versements faits à tous les niveaux de gouvernement et cette divulgation doit survenir dans les 150 jours qui suivent la fin de l’exercice financier des sociétés visées. La règle entre en force pour tout exercice financier se terminant après le 30 septembre 2013.

Or, plusieurs sociétés minières œuvrant au Québec sont inscrites à la Bourse de New York : les ArcelorMittal, Cliff Resources, Agnico Eagle, IamGold, Barrick Gold, Gold Corp., et autres.

Ces entreprises devront, prochainement et désormais, divulguer les montants versés au gouvernement du Québec pour leur exploitation minière. En fait, les sociétés dont l’année financière se termine le 31 décembre devront avant le 31 mai 2014 dévoiler les sommes payées en 2013.

Or, il serait inacceptable que ces sociétés doivent, de par la loi américaine, être transparentes au Québec alors que d’autres sociétés minières, non inscrites à une Bourse américaine, continueraient de ne pas divulguer les montants versés à l’État québécois.

Le gouvernement du Québec devrait imposer la même règle de divulgation à toutes les sociétés exploitant des mines au Québec.

Les opinions exprimées dans ce texte n’engagent que l’auteur.