Quel est le rapport rendement/prix de votre PDG ?
Stéphane Rolland | Les AffairesLes PDG du Québec inc. vous en donnent-ils pour votre argent ? Dans l’ensemble, le lien est faible entre leur rémunération et la valeur créée pour les actionnaires. C’est la conclusion de la cinquième édition de notre palmarès sur le rapport rendement-rémunération, mené en collaboration avec les firmes Inovestor et Gestion de portefeuille stratégique Medici.
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Le portrait est donc le même d’une année à l’autre, malgré l’intérêt des médias, des experts de la gouvernance, des investisseurs activistes et institutionnels pour la question. Pourquoi les choses ne changent-elles pas ?
Après une trentaine d’années à étudier la gouvernance, Michel Magnan constate, lui aussi, que, malgré les appels à la retenue, les rémunérations ont continué leur ascension et sont encore devenues plus complexes. « La potion magique, nous ne l’avons pas trouvée malgré les centaines de recherches sur ce que serait la rémunération idéale, admet le professeur et titulaire de la chaire de gouvernance d’entreprise Stephen A. Jarislowsky à l’École de gestion John-Molson de l’Université Concordia. Ce qu’on sait, en revanche, c’est qu’un dirigeant ne fera pas un meilleur travail parce qu’il est mieux payé. Ce n’est pas parce que la rémunération est plus complexe, non plus, qu’on va obtenir une meilleure performance. »
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Le débat public amène tout de même des changements. Dans des entrevues distinctes, M. Magnan et Mme Turcotte donnent en exemple le vote consultatif sur la rémunération qui s’est répandu. Les deux experts affirment que la pratique ne semble pas avoir eu d’effets visibles pour l’instant. M. Magnan pense même qu’elle aurait contribué à rendre les rémunérations encore plus complexes. Mme Turcotte, pour sa part, croit tout de même que leur adoption montre l’utilité du débat. « Le vote n’a pas provoqué de grands changements aux façons de faire pour l’instant, mais il montre qu’il y a quand même des tentatives parce qu’on en parle », commente-t-elle.
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Stanley Ma, toujours premier
Pour la cinquième année consécutive, Stanley Ma, PDG et fondateur de Groupe MTY, trône au sommet du palmarès, et par une bonne marge. Pour chaque point de performance de notre indicateur, M. Ma coûte 7 401 $ en rémunération, comparativement à 294 047 $ pour le PDG moyen de notre échantillon. À performance égale, le dirigeant coûte donc 40 fois moins cher.
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Il faut dire que le modèle de rémunération est dans une classe à part. Le chef de direction – qui quittera son poste en novembre, mais restera président du conseil – reçoit la rémunération la plus modeste de notre échantillon, à 450 199 $. Relativement simple en comparaison aux pratiques les plus répandues, la rémunération comprend un salaire et une allocation pour la voiture, mais aucune option ni prime.
Yvan Allaire, président exécutif du CA de l’Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques (IGOPP), salue cette retenue. « Je suis critique des entrepreneurs fondateurs qui se versent des options parce qu’ils font tellement d’argent lorsque le titre monte, commente-t-il. Ils n’en ont pas besoin. M. Ma a compris ça et c’est tout à son honneur. En revanche, on ne peut pas dire que sa rémunération n’est que de 450 000 $. »
Le fondateur détient 19,42 % des actions du franchiseur montréalais. En 2017, le dividende reçu de ses 4,89 millions d’actions représente un revenu de placement de 2,2 millions de dollars.