L’Éducation et l’Enseignement supérieur derniers de classe
Bulletin chiffré des ministères
Louise Leduc | La PresseUn bulletin chiffré vient d’être remis à tous les ministères du Québec par le Conseil du trésor. En queue de peloton ? L’Enseignement supérieur, avec une note globale de 47 %, et l’Éducation, qui récolte 58 %, tandis que le ministère de la Santé arrive au troisième rang des pires notes (67 %). Les ministères du Tourisme, de l’Économie et de l’Innovation et le Conseil exécutif, tous au-dessus de la barre des 90 %, font figure de bons élèves.
Le « Tableau de bord de la performance de l’administration publique » 2021-2022 n’a pas été publicisé et il faut chercher fort pour le trouver sur l’internet. Il est fait de dizaines d’indicateurs (respect des échéanciers, gestion des ressources de l’État, bonnes pratiques, etc.) et de cibles (basées, celles-là, sur les propres buts fixés par les ministères eux-mêmes).
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Un exercice important, un outil perfectible
Steve Jacob, professeur de science politique à l’Université Laval spécialisé en évaluation de programmes, estime que ce tableau de bord de la performance de l’administration publique « est un bon départ » et que cet exercice de reddition de comptes est nécessaire, bien que l’outil soit imparfait et puisse faire sourciller à plusieurs égards.
M. Jacob donne pour exemple la cible de 33,7 % des médailles olympiques aux Jeux olympiques de 2021 récoltées par des athlètes québécois par rapport à l’ensemble des athlètes canadiens. « Pourquoi 33,7 % ? Pourquoi pas 31 % ou 38 % ? »
Mais surtout, il note que si le ministère de l’Éducation, des Loisirs et du Sport s’est fixé une cible d’obtention de médailles, il n’y en a aucune qui a trait à la réussite scolaire autochtone, par exemple.
La grande question, c’est de savoir si les cibles établies par chacun des ministères « reflètent vraiment les priorités de la société québécoise ».
Mais tout se mesure-t-il ? Beaucoup de choses, oui, mais encore faut-il, répond M. Jacob, que l’analyse quantitative soit assortie d’une analyse qualitative et qu’on se demande si ce que l’on mesure « permet de changer les choses ».
Et de comprendre ce qui est évalué. Car comme le souligne M. Jacob, la méthodologie fait plus de 40 pages.
Ce type de gestion par résultats a par ailleurs certains effets pervers, fait observer M. Jacob, qui évoque les nombreuses études démontrant que cela amène souvent les gens en poste à tricher de différentes manières pour bien paraître.
Pour sa part, Me Patric Besner, vice-président de l’Institut sur la gouvernance (IGOPP), trouve lui aussi l’outil « extrêmement intéressant », bien que perfectible.
Il s’étonne par exemple que le ministère de la Justice ne se soit pas fixé de cible quant « aux délais interminables pour les causes civiles ».
« Comment expliquer, aussi, qu’il n’y ait pas d’objectifs clairs de ce même ministère pour régler le problème criant de pénurie de juges et de greffiers ? », se demande Me Besner.
Cela étant dit, il juge important un tel « tableau de bord » qui, rappelle-t-il, doit être un outil et non pas une fin. Car si un budget est dépassé de peu pour mettre en œuvre une mesure importante pour la population, il serait regrettable que les personnes en autorité s’en abstiennent de peur de perdre des points.
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