20 mars 2024

Rémunération chez Transat – Des dettes gouvernementales coûteuses pour la présidente

Julien Arsenault | La Presse

L’incapacité de Transat A.T. à rembourser l’aide gouvernementale pandémique oblige ses dirigeants à renoncer à de généreuses primes même si elles ont été promises. Près d’un demi-million ont glissé entre les doigts de sa présidente et cheffe de la direction, Annick Guérard, l’an dernier, et ce n’est peut-être pas fini.

Ce constat figure dans la circulaire de sollicitation envoyée aux actionnaires du spécialiste du voyage d’agrément en vue de l’assemblée annuelle prévue le 23 avril prochain. Le document révèle également que la paye globale – qui tient compte du salaire de base et des autres avantages – de ses cinq principaux dirigeants s’est élevée à 5,2 millions en 2022. La présidente a eu droit à un traitement de 1,9 million, ce qui tient compte de la valeur de son régime de retraite (1,3 million).

Les dettes de l’entreprise à l’étoile bleue envers Ottawa ont privé Mme Guérard d’un paiement de 489 523 $ qui lui avait été promis en 2020, lorsqu’elle était la numéro deux de l’organisation. Il s’agissait d’une sorte de prime de rétention au moment où Air Canada proposait d’acheter Transat – un mariage qui a avorté en avril 2021.

« Elle n’a donc pas pu percevoir ce montant », précise la circulaire.

La société mère d’Air Transat fait partie des entreprises qui se sont tournées vers le Crédit d’urgence pour les grands employeurs (CUGE) pour traverser la pandémie. Offert sous forme de prêt, ce soutien s’accompagne de conditions, comme le plafonnement du salaire de base des hauts dirigeants et l’interdiction des octrois fondés sur des actions ou des options sur des titres, notamment.

Offrir maintenant, payer plus tard

Pour récompenser ses cinq principaux patrons malgré les restrictions fédérales, Transat a opté pour les primes différées. Elle leur offre, depuis 2021, un « boni » payable trois ans après la date où il aurait normalement été versé. L’an dernier, la somme s’est établie à 1,5 million et totalise 4 millions depuis trois ans. D’autres paiements devraient avoir lieu cette année, à condition que les prêts obtenus par le CUGE soient remboursés. Le voyagiste et transporteur aérien a cependant du pain sur la planche.

« On parle de sommes importantes, souligne François Dauphin, directeur de l’Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques (IGOPP). Si la tendance se maintient, la privation des membres de la haute direction risque de se poursuivre. »

Transat doit remettre quelque 745 millions au gouvernement fédéral, en tenant compte des remboursements à effectuer (353 millions) en crédits de voyage. Pour faire disparaître les restrictions du CUGE, la somme à rembourser est de 392 millions. Le taux d’intérêt d’une des facilités de crédit (327 millions) a grimpé de 3 points de pourcentage depuis le début de l’année pour atteindre 8 %. L’échéance de ce prêt est prévue en 2026.

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