29 mai 2020

Une réforme pressante

Robert Dutrisac | Le Devoir

Après un peu plus d’un mois de présence dans les CHSLD, l’armée canadienne, par la voix de son Commandement de la composante terrestre, a produit ses « observations » sur la situation dans ces établissements ravagés par des contagions de la COVID-19.

Si le ton est posé et les rapports sur les 25 établissements où sont intervenus les militaires sont factuels, le portrait global qui se dégage est accablant, surtout pour certains CHSLD où la désorganisation était particulièrement marquée. Il faut dire d’entrée de jeu que l’armée a été dépêchée dans des CHSLD où la situation était gravissime et les cas de contamination, nombreux.

À leur arrivée, les militaires constataient souvent « un manque de personnel et un haut taux d’absentéisme général ». La pénurie de PAB (préposées aux bénéficiaires) se traduisait par « une incidence directe sur l’hygiène des résidents ». Les militaires ont dû au départ instaurer une discipline quant au port de l’équipement de protection et à sa manipulation et corriger la gestion problématique des « zones froides, tièdes et chaudes ». Dans bien des cas, la direction des CHSLD était déficiente et parfois l’équipe de gestion était décimée par la maladie. « Les défis principaux semblent résider dans la structure du leadership de l’établissement et de la gestion des priorités des tâches », peut-on lire.

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Plusieurs CHSLD n’ont pas de véritables patrons, s’est plaint le premier ministre. Ils sont gérés à distance par des cadres des CIUSSS ou des CISSS. Il est beaucoup plus facile de se satisfaire d’une pénurie de préposées aux bénéficiaires quand elle n’est qu’une donnée qui figure sur l’écran d’un ordinateur. Tout en bas de l’organigramme des CIUSSS et des CISSS, les CHSLD ont été manifestement négligés.

Selon l’Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques (IGOPP), les CHSLD ne comptent pas de directeur général avec des responsabilités d’ensemble, mais bien un « chef d’unité » qui dépend de différents directeurs répartis dans plusieurs bureaux sur le vaste territoire des CIUSSS ou des CISSS, un chef d’unité dont on se demande quelles sont les responsabilités et les tâches. Or, la pandémie a mis à mal ce système « d’une effarante complexité », au caractère « kafkaïen », marqué par « une dilution des responsabilités et une lenteur pathologique dans la prise de décision ».

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