Gouvernance, gouvernement et la caisse de dépôt
Yvan Allaire | IGOPPDe toutes les sociétés d’État du Québec, la caisse est unique par ses règles de gouvernance. En effet, elle est la seule société d’État dont le conseil d’administration nomme le président directeur général (PDG) avec l’assentiment du gouvernement. Toutefois, pour toutes les autres sociétés, le gouvernement nomme le PDG après consultation du conseil. Nous avons plaidé devant la commission des finances lors de l’étude du projet de loi — sur la modernisation des sociétés d’État, que le gouvernement devrait adopter la même démarche de nomination du PDG pour la caisse de dépôt que pour les autres grandes sociétés d’État (Hydro-Québec, SAQ, Loto-Québec,…) visées par le projet de loi.
Nous avons invoqué le principe premier de la gouvernance; l’actionnaire nommé élut les membres du conseil, les administrateurs; ceux-ci nomment le PDG. Au moment de choisir un PDG, le conseil d’administration connait bien mieux que le gouvernement-actionnaire les enjeux, défis et carences de l’organisation, l’humeur des troupes, la qualité de la relève interne à l’organisation. Le conseil, par un comité de sélection, peut interviewer longuement les différents candidats, vérifier leurs états de service, juger les réactions des différentes parties prenantes à la nomination de l’un ou l’autre candidat.
Un conseil qui n’est pas responsable de la nomination et de la rémunération du PDG, perd ainsi une bonne partie de sa légitimité et de sa crédibilité. Comment peut-il prétendre être le patron du PDG quand celui-ci fut nommé par le gouvernement et par conséquent que seul le gouvernement peut le destituer.
Le gouvernement fut insensible à nos arguments, sauf en ce qui concerne la caisse de dépôt (dont la loi avait déjà été adoptée plus tôt en décembre 1984).
De toute évidence, décontenancé par le maelstrom médiatique et la furie de l’opposition parlementaire, le gouvernement, au cours de l’automne et au moment de la publication de résultats de la caisse, a décidé, plus ou moins ouvertement, de soumettre la caisse à la même démarche de nomination du PDG que les autres sociétés d’État, tout en respectant la lettre de sa loi.
Souhaitons que cette façon de procéder n’entache la légitimité et la crédibilité du conseil d’administration et de son nouveau PDG.