Gildan en pourparlers avec des acquéreurs potentiels
Richard Dufour | La PresseAu cœur de la tourmente depuis décembre, la 15e entreprise québécoise en importance en Bourse est maintenant à vendre. Et le nom du conglomérat dirigé par l’investisseur américain Warren Buffett circule déjà comme possible prétendant pour Gildan.
Après avoir été contacté récemment par un acquéreur intéressé, le conseil d’administration du fabricant montréalais de vêtements a formé un comité spécial qui discute présentement avec des acheteurs potentiels.
Ce développement survient trois mois après le congédiement surprise du cofondateur de Gildan, Glenn Chamandy, qui dirigeait l’entreprise depuis 20 ans. Son départ justifié par des questions de succession et de stratégie a plongé Gildan dans une lutte de pouvoir opposant le conseil d’administration à un groupe d’actionnaires institutionnels en désaccord avec le licenciement de Glenn Chamandy.
Un comité spécial de Gildan a pris contact de façon ciblée avec un petit nombre de contreparties potentielles réputées, indique le porte-parole de Gildan, Simon Beauchemin.
« Plusieurs de ces contreparties ont exprimé de l’intérêt à envisager une opération à l’amiable avec Gildan », précise-t-il.
Simon Beauchemin explique que c’est en réponse à la réception d’une manifestation d’intérêt non contraignante visant l’acquisition de Gildan que le conseil a mis sur pied un comité spécial en vue d’étudier le bien-fondé de la proposition et toute autre proposition d’opération, dont le maintien du statu quo et la poursuite de l’exécution du plan d’affaires existant.
« Après avoir consulté ses conseillers juridiques et financiers et avoir pris en compte l’intérêt des actionnaires et des autres parties prenantes, le comité spécial a déterminé qu’il était compatible avec ses devoirs fiduciaires et dans l’intérêt de Gildan de communiquer avec d’autres initiateurs potentiels en vue de maximiser la valeur de toute opération éventuelle. »
Simon Beauchemin mentionne toutefois que rien ne saurait garantir qu’une opération découlera de ces discussions.
L’analyste Martin Landry, chez Stifel/GMP, croit que le conseil de Gildan a maintenant un argument pour retarder la tenue de l’assemblée des actionnaires prévue à la fin mai afin d’avoir suffisamment de temps pour examiner toutes les alternatives.
Il juge faible la probabilité d’une transaction puisque les actionnaires dissidents sont susceptibles d’exiger une prime de rachat élevée compte tenu de leur vision à long terme. Les actionnaires mécontents exigeront, selon lui, au minimum 45 $ US par action, ce qui représenterait un sommet historique pour le titre.
« Il y en a qui ont peut-être senti une occasion de faire une acquisition pour mettre fin aux tribulations », commente de son côté le président de l’Institut sur la gouvernance, François Dauphin.
« Sauf que le groupe d’actionnaires mécontents disant contrôler 35 % des actions détient plus que la minorité de blocage. En théorie, ces actionnaires ont la capacité de bloquer une vente de l’entreprise si jamais il devait y avoir un vote sur une transaction », ajoute-t-il.
Un acquéreur potentiel doit donc s’assurer d’obtenir l’appui d’au moins un des actionnaires institutionnels dissidents, souligne François Dauphin. « C’est la partie intrigante dans cette histoire-là », dit-il.
« Ceux qui se disaient en faveur du retour de Glenn Chamandy verront-ils une occasion plus intéressante encore avec un acquéreur que simplement avec le retour en poste de l’ex-PDG ? Ça va prendre une offre sur la table pour pouvoir l’évaluer clairement. »
La firme d’investissement de Los Angeles Browning West mène depuis décembre une cabale pour reconstituer le conseil de Gildan et ramener Glenn Chamandy en poste. Browning West a proposé cet hiver de faire élire huit nouveaux membres au conseil lors de l’assemblée prévue le 28 mai.
La possibilité de voir Gildan devenir une cible d’acquisition pouvait être anticipée. Le mot circule depuis un moment voulant que ça pourrait même faire partie d’une stratégie du conseil pour tenter de calmer le jeu.
On chuchotait déjà en décembre que des entreprises manufacturières étrangères (chinoises et mexicaines, par exemple) pourraient vouloir acquérir une base manufacturière comme celle de Gildan.
Si une firme privée d’investissement peut trouver son compte avec Gildan en raison notamment des flux de trésorerie générés par l’entreprise, l’analyste George Doumet, de la Scotia, croit que le conglomérat de Warren Buffett, Berkshire Hathaway, pourrait aussi s’intéresser à Gildan.
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