29 février 2020

Bombardier: le déraillement

Jean-François Codère, Marie Tison, Richard Dufour et Nathaëlle Morissette | La Presse

De l’entreprise dotée, il y a 20 ans, d’une « réputation de gagnant, de fiabilité et de stabilité » à la mal-aimée qui vient de vendre la totalité de son secteur ferroviaire, l’histoire de Bombardier depuis deux décennies a été marquée par de multiples décisions risquées qui n’ont pas tourné en sa faveur. Une quinzaine d’anciens hauts dirigeants ou de proches observateurs en font le récit.

2001-2005 : grosse acquisition, gros problèmes

« Numéro un mondial du matériel ferroviaire », titre le numéro du 5 août 2000 de la section économique de La Presse, au-dessus d’une grande photo du PDG Robert Brown, rayonnant.

En échange de 725 millions US (1,1 milliard CAN à l’époque), Bombardier met la main sur une entreprise allemande comptant 20 000 employés et des revenus de 5 milliards. Son carnet de commandes passe d’un coup de 8,7 à 22 milliards CAN.

À cette époque, Bombardier Transport ne compte elle-même que 16 000 employés et des revenus de 3,1 milliards, bien moins qu’Adtranz. L’entreprise entière, elle, perçoit des revenus de 15 milliards, dont 10 proviennent de son secteur aéronautique, 1,6 des produits récréatifs et 900 millions de sa division Bombardier Capital.

La division Transport a un problème important : elle ne fabrique pas de locomotives ni de matériel de signalisation. Ses soumissions doivent inclure du matériel fabriqué par ses concurrents, qui n’ont pas intérêt à lui faire un bon prix.

« Soit on sortait de ce marché parce qu’on était vulnérable, soit on achetait », résume Yvan Allaire, l’un des dirigeants responsables de la décision d’aller de l’avant.

Derrière les sourires se cachent néanmoins quelques inquiétudes. Adtranz vient avec une série de problèmes.

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