22 juin 2025

Québec pourrait-il poursuivre le C.A. de la SAAQ ?

Vincent Laurin | La Presse

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« Si un des membres du conseil d’administration savait quelque chose, le conseil au complet, dont la présidente, aurait dû être informé de ces inquiétudes-là. » (Luc Bernier, professeur de l’École supérieure d’affaires publiques et internationales de l’Université d’Ottawa)

« C’est un dépassement de coûts majeur à ce moment-là. »

« Ç’aurait dû être fait », renchérit la vice-présidente de l’IGOPP, Alexandra Langelier. « Si ça n’a pas été le cas, on peut se demander pourquoi. »

Passer par la PDG

Or, de l’aveu même de la présidente du C.A. de 2016 à 2021, Lorna Telfer, cette dernière n’a jamais cru bon de contacter le ministre des Transports d’alors, François Bonnardel.

« Si j’avais été au courant de ce qui allait arriver à CASA, comme je l’ai lu dans les journaux, j’allais certainement demander une rencontre [au ministre], et je n’aurais pas accepté un non ! », a-t-elle même soutenu devant le commissaire Denis Gallant.

Lorna Telfer, comme membre d’un important comité du C.A., avait pourtant refusé un examen détaillé des dépenses liées à CASA au printemps 2020, de peur que la PDG Nathalie Tremblay pense que les administrateurs avaient perdu confiance en elle, a relaté Jude Martineau lors de son témoignage.

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L’administratrice s’en remettait plutôt à la PDG pour entretenir les contacts avec le bureau du ministre, a-t-elle indiqué dans son témoignage.

Au sein d’une société d’État, c’était pourtant son rôle à elle, fait valoir la vice-présidente de l’Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques (IGOPP), Alexandra Langelier.

« C’est dans des cas tout à fait exceptionnels que le PDG pourrait entrer en contact avec le ministre. » (Alexandra Langelier, vice-présidente de l’Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques)

« C’est le rôle du président du conseil, par exemple, s’il y a des suspicions de dépassements de coûts », explique-t-elle.

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À la lumière de ces informations, Québec aurait des motifs d’entreprendre un recours à l’endroit du C.A. de la SAAQ, estime Luc Bernier.

Comme c’est souvent le cas au privé, les conseils d’administration des sociétés d’État sont généralement couverts par une assurance responsabilité face aux éventuels recours des actionnaires, ici le gouvernement du Québec.

Si vous poursuivez Elon Musk, il a des milliards pour vous rembourser, mais [en poursuivant] les membres d’un C.A., même s’il y a une assurance […], on ne récupérera pas 500 millions.

Luc Bernier, professeur de l’École supérieure d’affaires publiques et internationales de l’Université d’Ottawa

« En principe, ça se peut ; en pratique, qu’est-ce que ça donnerait ? »

Sans s’avancer sur l’opportunité d’une poursuite du gouvernement, Alexandra Langelier juge que « les rôles du C.A. sont mal compris ». Parmi ses recommandations, le commissaire Denis Gallant pourrait assurément suggérer d’« assurer cette compétence des administrateurs », croit l’experte, « parce qu’en fin de compte, c’est eux, les chiens de garde ».

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