21 septembre 2017

Le bilan de santé du système de santé québécois!

Yvan Allaire | Le Devoir

Un organisme américain, le Commonwealth Fund, organise et mène de façon régulière de vastes enquêtes internationales sur différents aspects des systèmes de santé.

Ainsi, en 2015, un sondage, comportant 34 questions, fut mené auprès de 11 547 médecins-omnipraticiens dans 10 pays (Canada, États-Unis, Royaume-Uni, Allemagne, Suède, Norvège, Suisse, Pays-Bas, Nouvelle-Zélande et Australie). L’échantillon comportait 2 284 répondants du Canada, dont 455 du Québec.

Puis, en 2016, un sondage, comportant 54 questions, fut mené auprès de 25 770 adultes (18 ans et plus) dans 11 pays (la France s’étant ajoutée à la liste en 2016). Quelque 4 547 répondants proviennent du Canada, dont 1094 du Québec.

À l’exception des États-Unis, tous ces pays se sont dotés d’un régime universel de soins de santé. Toutefois, l’étendue de la couverture et le mode de gestion du système varient grandement d’un pays à l’autre.

Le Commonwealth Fund a publié un rapport en juillet 2017 intitulé « Mirror, Mirror 2017 : International Comparison Reflects Flaws and Opportunities For Better U.S. Health Care” rendant compte des résultats obtenus par pays. Le rapport regroupe toutes les données sous cinq dimensions d’un système de santé : (1) Processus de soin; (2) L’accès aux soins; (3) L’efficacité administrative; (4) L’équité du système; (5) Les résultats en termes de soins de santé.

Sur cette base, le rapport établit un ordonnancement des pays, montrant que globalement, les États-Unis arrivent au dernier rang et le Canada au 9e rang sur les 11 pays (et au 10e rang pour l’accès aux soins). Les pays ayant la meilleure note seraient le Royaume-Uni, l’Australie et les Pays-Bas, trois pays dotés de systèmes de santé pourtant très différents.

Évidemment, le système de santé relevant des provinces canadiennes, les résultats pour le Canada deviennent une sorte de moyenne des performances des provinces.

L’IGOPP a obtenu du Commonwealth Fund et de leur partenaire canadien, l’Institut canadien d’information sur la santé les résultats des deux sondages pour chaque province afin de comparer le système de santé québécois à celui des autres provinces et d’autres pays.

La somme des données et informations produites par ces deux sondages est énorme; aussi, pour les fins de ce texte, nous en tirons les éléments qui nous semblent les plus éloquents et pertinents surtout en ce qui concerne l’accessibilité des soins.

Seulement 26 % des Québécois qualifient d’excellents/très bons les soins de santé obtenus comparativement à 52 % en Ontario alors que la moyenne internationale se chiffre à 51 %.

Les Québécois estiment à 63 % comparativement à 54 % en Ontario et à 46 % à l’international que le système comporte de bonnes choses, mais que des changements fondamentaux doivent y être apportés. La même question fut soumise aux médecins omnipraticiens en 2015 révélant une forte convergence entre ce que pensent les citoyens et les médecins. Au Québec, les deux tiers des répondants, individus et médecins, estiment que des changements fondamentaux doivent être apportés au système par rapport à 57 % en Ontario et 54 % à l’international.

L’accessibilité des soins au Québec

Trois quarts des Québécois déclarent avoir accès à un médecin de premiers soins, un résultat sensiblement inférieur à l’Ontario (89 %) et à la moyenne internationale (80 %).

Toutefois, les temps d’attente pour les services d’urgence sont remarquablement plus longs au Québec qu’ailleurs. Ainsi, 27 % des Québécois qui se sont rendus aux services d’urgence au cours des deux dernières années ont attendu plus de huit heures et 51% ont attendu plus de quatre heures. Pour l’Ontario et l’ensemble du Canada, 24% et 29% respectivement déclarent avoir attendu quatre heures et plus. Pour les autres pays, seulement 11% ont eu une telle expérience.

Cela s’explique possiblement par le fait que seulement 36% des cabinets de médecins-omnipraticiens au Québec ont adopté des mesures pour que les patients aient accès à un médecin ou une infirmière s’ils en ont besoin lorsque la clinique est fermée (après les heures de travail et les fins de semaine) sans devoir se rendre aux urgences d’un hôpital.

En Ontario, 66% des médecins ont adopté de telles mesures et 75% font de même à l’international.

De plus, 21% des répondants du Québec déclarent avoir dû attendre au moins deux semaines pour obtenir un rendez-vous avec un médecin. En Ontario, seulement 8% ont dû attendre aussi longtemps et 5 % au niveau international.

Les médecins-omnipraticiens du Québec à 81% estiment que leurs patients attendent souvent longtemps avant de voir un spécialiste. En Ontario, 60% des omnipraticiens sont de la même opinion et 45% à l’international.

Aussi, 64% des omnipraticiens québécois estiment qu’il est souvent difficile pour leurs patients d’obtenir des examens diagnostiques (p. ex. CT scan, mammographie, IRM) comparativement à 19 % des médecins ontariens et à 21 % à l’international.

Il convient de noter que les individus interviewés qui ont au cours des deux années précédentes ont séjourné dans un hôpital québécois expriment à 96 % une grande satisfaction pour la courtoisie et le respect avec lesquels ils ont été traités par les médecins et le personnel infirmier, un résultat supérieur à celui observé en Ontario (80%).

Conclusions

Il semble que le système canadien dans son ensemble devrait faire l’examen et adopter, s’il y a lieu, certaines pratiques et  modes d’organisation qui ont cours dans d’autres pays. Quant au système de santé québécois, il est difficile de comprendre qu’il ne puisse à tout le moins égaler les meilleures performances canadiennes puisque les fondements du système sont sensiblement les mêmes d’une province à l’autre.