Cégep de Jonquière: des contrats donnés à des proches du personnel
Le Cégep de Jonquière a versé des milliers de dollars à des entreprises liées à du personnel depuis 5 ans
Kathryne Lamontagne | Le Journal de MontréalLe Cégep de Jonquière a octroyé des contrats totalisant des dizaines de milliers de dollars à des entreprises liées à du personnel de l’établissement au cours des cinq dernières années, a appris notre Bureau d’enquête.
Des documents obtenus à la suite d’une demande d’accès à l’information ont permis d’établir qu’une vingtaine de contrats ont été décernés depuis 2017 à trois entreprises au sein desquelles un administrateur, un coordonnateur et une employée du Cégep de Jonquière à Saguenay ont des intérêts (voir plus bas).
La plus grosse part du gâteau revient à Trigone, une entreprise notamment spécialisée en ressources humaines, où travaille comme directeur Martin Jean. Ce dernier est aussi vice-président du conseil d’administration du cégep depuis 2016.
De 2017 à ce jour, Trigone a mis la main sur une dizaine de contrats totalisant près de 40 000 $. Notons que Trigone n’avait obtenu qu’un seul contrat avec le Cégep de Jonquière au cours des 17 années précédentes.
Gestionnaire et chargés de cours
Deux antennes du collège, basées dans Charlevoix, ont aussi attribué près d’une dizaine de contrats totalisant plus de 11 000 $ à Katabatik, en 2020 et 2021. L’entreprise de plein air appartient à Sébastien Savard, qui était jusqu’à tout récemment coordonnateur gestionnaire de l’établissement collégial.
La compagnie spécialisée en expéditions Désir de découvrir a, quant à elle, obtenu deux contrats totalisant près de 5000 $, en moins de six mois. L’entreprise est la propriété de Jessica Zajko, qui a été chargée de cours pour l’établissement collégial. Désir de découvrir emploie aussi, par ailleurs, un autre chargé de cours du cégep.
L’institution se défend
À une exception près, tous les contrats ont été donnés de gré à gré puisque leur valeur était sous la barre des 5000 $.
Le Cégep de Jonquière se défend d’avoir favorisé des membres du personnel dans l’octroi de ces contrats et assure avoir suivi les mécanismes en place pour éviter les conflits d’intérêts.
Dans le cas de Katabatik, Sébastien Savard a été rencontré par la direction et exclu du processus d’acquisition. Des démarches ont aussi été faites pour obtenir une deuxième estimation avant de requérir les services de Katabatik, assure le cégep.
L’établissement n’a toutefois pas été en mesure de démontrer que cet exercice avait été réalisé pour les compagnies Désir de découvrir et Trigone. Dans le cas de Trigone, le cégep se justifie en avançant que d’autres compagnies offrant des services similaires ont aussi obtenu des contrats entre 2017 et 2022.
Renforcer la politique
Ce dernier argument n’a « aucune pertinence dans la gestion du conflit d’intérêts », selon Patric Besner, vice-président de l’Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques (IGOPP).
Il estime que le cégep aurait tout avantage à renforcer sa politique d’acquisition afin de mieux documenter l’octroi de contrats à des membres du personnel. Ces contrats devraient par ailleurs être révisés par la haute direction ou le conseil d’administration avant d’être donnés.
« Ce qui est important, c’est d’avoir un deuxième niveau de sécurité ou de surveillance pour assurer que les contrats sont octroyés dans le meilleur intérêt du cégep », estime le conseiller Luc Martinet, de l’IGOPP.
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