15 août 2022

Chantier Davie: D’un paradis fiscal à l’autre pour les propriétaires

Maxime Bergeron | La Presse

Les propriétaires du chantier Davie ont discrètement changé la structure de l’entreprise, en 2020, pendant leurs négociations en vue d’obtenir 10 milliards en contrats fédéraux, a appris La Presse. Ils ont transféré la société de contrôle d’un paradis fiscal ultraopaque – les îles Vierges britanniques – vers un autre qui l’est moins, l’île de Guernesey. Une manœuvre avalisée par Ottawa et Québec, qui n’aurait rien à voir avec des raisons fiscales selon les actionnaires européens du groupe.

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À la clé : 10 milliards de dollars en contrats fédéraux pour la construction d’au moins sept brise-glaces pour la Garde côtière. De quoi fournir de l’ouvrage pendant plus de 20 ans aux travailleurs et fournisseurs du groupe – et des bénéfices considérables à ses propriétaires européens.

La création de GMI à Guernesey a été le point central d’une importante restructuration des entités qui contrôlent le chantier Davie, révèle une enquête de La Presse. Cette opération financière complexe s’est jouée en toute discrétion entre Monaco, Londres, les îles Vierges britanniques, Guernesey, Québec et Ottawa. Les actionnaires et principaux dirigeants de Davie sont restés les mêmes au terme de ce grand rebrassage international.

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En entrevue dans les bureaux de Davie à Lévis, James Davies, qui est aussi président et chef de la direction du chantier, défend avec vigueur la légitimité de cette nouvelle structure. La chaîne de propriété de l’entreprise est « très, très simple », affirme le Britannique de 51 ans.

Si son partenaire et lui ont décidé de créer une nouvelle société à Guernesey, c’est d’abord et avant tout parce que l’île de 63 000 habitants offre un environnement réglementaire « flexible » et « sophistiqué ». Cette structure, croit-il, permettra à son groupe de percer plus facilement des marchés internationaux comme le Royaume-Uni et les États-Unis à l’avenir. Tous les impôts dus au Québec et au Canada ont toujours été payés, et aucun dividende ni aucune autre somme n’ont transité vers Guernesey, affirme le dirigeant.

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Légal et fréquent

Le cas de la Davie ne présente pas d’enjeux légaux particuliers aux yeux de l’avocat Patric Besner, vice-président de l’Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques.

« Le fait de détenir directement ou indirectement une entreprise par une formule étrangère n’est pas problématique en soi, dit-il. Ensuite, il peut y avoir un problème d’acceptabilité sociale à cet égard. Ce n’est pas un problème juridique, mais ça pourrait être vu comme un élément non acceptable de la part de la population. »

Le professeur Jack Mintz, qui dirige l’École de politiques publiques de l’Université de Calgary, souligne pour sa part que la structure de propriété adoptée par les actionnaires de Davie n’est « pas inhabituelle », loin de là. « C’est de l’évitement fiscal, indéniablement. Tout le monde en fait, à un certain degré. »

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