27 novembre 2023

Lion Électrique licencie 10% de ses effectifs

Clémence Pavic | Le Devoir

Malgré l’engouement pour l’électrification des transports, Lion Électrique fait face à des défis de liquidités, typiques d’une entreprise en croissance. Lundi, le constructeur d’autobus et de camions électriques basé à Saint-Jérôme a dû se résoudre à licencier 150 employés, soit environ 10 % de son effectif, pour limiter ses dépenses.

Par voie de communiqué, le chef de la direction et fondateur de Lion Électrique, Marc Bédard, souligne que cette décision a été « très difficile à prendre », mais il estime que « cette initiative est la plus judicieuse pour [l’entreprise] à ce stade-ci ». Elle permettra de « diminuer sa structure de coûts et d’améliorer sa capacité à atteindre ses objectifs de rentabilité ».

Les employés touchés par l’annonce occupaient principalement des « fonctions de soutien à la production, de fabrication, de développement de produits et d’administration, au Canada et aux États-Unis », indique la compagnie, sans toutefois détailler quelle part exacte des employés licenciés travaillaient de chaque côté de la frontière.

Des pertes et une marge très faible

Cette vague de licenciements survient à un moment où l’entreprise affiche toujours des pertes d’exploitation, environ deux ans et demi après son entrée en Bourse.

Au début du mois de novembre, à l’occasion de la présentation des résultats financiers trimestriels de l’entreprise, Marc Bédard a réitéré sa volonté d’atteindre la rentabilité. Mais il y a encore du chemin à faire. Au troisième trimestre, la compagnie a légèrement creusé sa perte nette par rapport à la même période il y a un an. Celle-ci est passée de 17,2 millions à 19,9 millions de dollars américains (de 23,4 à 27,1 millions de dollars canadiens).

« On est face à un problème assez typique d’une société qui est en croissance et qui est dans une crise de liquidités à court terme », observe François Dauphin, président-directeur général de l’Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques.

« Sur une note positive, les ventes ont presque doublé d’une année à l’autre. Alors, la demande est présente. On ne double pas son chiffre d’affaires en un an si la demande n’est pas là ! Le problème, c’est que la marge brute demeure extrêmement faible », note-t-il. Et cela « ne suffit pas » pour couvrir les autres dépenses de l’entreprise, liées à ses charges administratives et financières.

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« C’est probablement une sage décision de faire des ajustements au niveau des opérations », juge M. Dauphin. L’expert estime que la compagnie doit chercher à accroître sa marge bénéficiaire brute et à limiter ses « sorties de fonds le plus possible, en raison aussi de l’incertitude au niveau des taux [d’intérêt] », qui pèsent sur la dette.

Une action au plancher

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En avril dernier, au moment de l’inauguration de l’usine de batteries de Lion Électrique à Mirabel, le ministre de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie, Pierre Fitzgibbon, avait renouvelé sa confiance envers l’entreprise et sa direction, mais avait toutefois signalé son inquiétude par rapport au prix de l’action de l’entreprise.

« Il faut faire attention de ne pas perdre ces sociétés. Quand on voit des prix boursiers comme celui-là, ma crainte, c’est que nous soyons vulnérables [à une offre d’achat] », disait-il.

Marc Bédard avait reconnu avoir été courtisé, mais s’était montré déterminé à garder le siège social au Québec. « Quand il y a un raz de marée comme en ce moment, c’est toujours plus dangereux [de se faire acheter]. Moi, je contrôle quand même une bonne partie [des actions] et je ne vends pas », avait-il dit.

Quant au premier actionnaire, Power Corporation, M. Bédard soulignait : « Je ne veux pas parler pour eux, mais je pense que ça se passe bien. »

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